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Parce qu’à un moment donné, lorsque le dialogue est inexistant, les alternatives repoussées sans raisons, les mensonges de plus en plus énormes, il nous faut, collectivement, nous indigner. Parce que l’eau est un bien commun, les rivières en bon état également, et non un vivier financier pour industriels ou politiques peu scrupuleux. Nous accusons !
 

 

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Retranscription :

Un nouveau barrage des Plats sur la Semène dans la Loire

Nous accusons

par le Collectif Loire Amont Vivante

Pour faire face à un hypothétique problème d’approvisionnement en eau potable d’une dizaine de communes des départements de la Loire et de la Haute-Loire, une poignée d’élus a décidé de reconstruire le barrage des Plats, sur la Semène, dans le Parc Naturel Régional du Pilat. Cet ouvrage d’une quinzaine de mètres de hauteur, n’offrant plus de garanties de sécurité suffisantes avait été percé en mars 2006 permettant à la rivière, sans barrage, de retrouver toute sa fluidité, de renforcer sa qualité d’eau et d’enrichir une biodiversité déjà remarquable. La Semène est aujourd’hui la plus belle rivière du département de la Loire, dont tous les cours d’eau ont été fortement aménagés aux XIXe et XXe siècle. La «Semène sauvage» est un «capital naturel» précieux, un exemple prometteur de restauration écologique d’un cours d’eau suite à l’effacement d’un barrage.
Édifié en 1958, d’une capacité de 1,7 millions de m3, le barrage des Plats avait pour objet d’accompagner la croissance de la ville de Firminy. Celle-ci devait compter 100 000 habitants en 2000 et Le Corbusier y construisait alors un remarquable ensemble architectural (église, unité d’habitation) : les élites inventaient, créaient du neuf pour améliorer cette cité industrielle de l’ouest stéphanois. Le grand barrage, symbole de progrès technique, accompagnait leur vision. Or, le quadruplement annoncé de la population n’a pas eu lieu. Firminy compte 17 000 habitants. Son économie minière et métallurgique a fondu. La ville doit faire face au problème des villes
industrielles en mutation, avec un taux de chômage important et un avenir à réinventer. Elle ne fait pas face à un problème de pénurie d’eau potable, mais d’adaptation à un monde qui change, un monde en recherche de durabilité et d’une meilleure gestion de ses écosystèmes, dont nous savons aujourd’hui à quel point leur bon état est nécessaire aux activités humaines.
Pourtant, son ancien maire, le député Dino Cineri, a orchestré un pilonnage administratif, avec le soutien de la Direction Départementale des Territoires de la Loire pour qu’un barrage obstrue à nouveau la rivière. Le chantier a débuté, après une enquête publique à la hussarde, indigne de notre démocratie.

Une politique de gestion de l’eau à l’envers

Une poignée d’acteurs influents a donc choisi de bétonner la Semène. Sans jamais accepter de mettre le projet en débat, comme l’y oblige la Convention d’Aarhus de l’Union Européenne ; sans étudier aucune alternative, comme l’impose la Directive Cadre sur l’Eau ; en oubliant de consulter une société civile compétente sur la gestion durable de la ressource en eau. Sans jamais expliquer les raisons de son choix, une minorité impose un barrage inutile pour un territoire qui doit se réinventer. Plus troublant, elle l’impose contre les avis techniques de l’Etat et des collectivités : Conseil Général de la Loire, de la Haute-Loire, le Conseil Régional Rhône-Alpes, l’Agence de l’Eau Loire Bretagne, la Dreal Rhône-Alpes et l’Onema avaient tous donné des avis techniques négatifs.
Et pour cause. D’une part, la ressource en eau potable est abondante sur le secteur, avec une réserve de 40 millions de m3 dans le barrage de Lavalette sur le Lignon, en Haute-Loire, propriété de la ville de St Etienne et exploitée en deçà de ses capacités. Mieux utiliser cette ressource, mutualiser les investissements lourds réalisés permettrait d’économiser des millions d’euros d’argent public. D’autre part, la restauration de la biodiversité, la protection des milieux aquatiques, leur non dégradation sont aujourd’hui inscrits dans les politiques publiques. La Semène héberge un grand nombre d’espèces et populations menacées, protégées, comme la très rare moule perlière. Enfin, reconstruire un barrage issu de l’optimisme des années 50 n’est pas le meilleur signal à donner quand les économies d’eau, la gestion durable d’une ressource vitale menacée par les changements climatiques et la crise économique obligent à repenser la gestion de cette ressource vitale. Il serait temps de s’en apercevoir, sur un bassin qui a lancé, en 1994, après dix années de combat de Loire Vivante, un « Plan Loire Grandeur Nature » exemplaire, modèle de gestion durable d’un fleuve à l’échelle européenne. Modèle, sauf dans le département de la Loire.

Nous accusons !

Le chantier du barrage des Plats est le symbole de ce dont nous ne voulons plus. Nous accusons donc ses élus promoteurs d’avoir conduit leur opération dans un cadre opaque, inadapté aux réalités d’aujourd’hui. La procédure étriquée de l’enquête publique, dont la prolongation a été refusée, n’a pu permettre d’associer la population à un projet qui engage son avenir pour un demi-siècle. Nous accusons les porteurs du projet de refuser la nouvelle donne démocratique que réclame l’époque, avec une exigence de participation citoyenne légitimée par le Grenelle de l’Environnement et confirmée par le Président de la République François Hollande avec la Conférence environnementale. L’intérêt général de gestion durable de la ressource en eau ne peut plus être défini à quelques uns, dans un espace confiné. Il faut associer, en France aussi, les corps intermédiaires à la décision et aux politiques publiques.
Nous accusons donc l’Etat local d’une incohérence fâcheuse. En poussant à la réalisation d’un tel ouvrage, il stoppe net tout progrès en matière d’économie d’eau et de mutualisation, d’interconnection des réseaux pour sécuriser les réseaux d’eau potable. Nous accusons ces aménageurs de très mal gérer l’argent public, en cette période de crise. L’alternative à ce barrage de 6,2 millions d’euros, payés pour une grande partie par l’argent du contribuable, celui des Conseils Généraux, de l’Etat, de l’Agence de l’Eau, permettrait d’économiser des millions d’euros. Ils seraient mieux utilisés dans des programmes d’économie d’eau pour l’habitat social ou encore le soutien à l’agriculture durable sur les bassins versants qui alimentent les collectivités, comme l’a fait New-York il y 15 ans.
Nous accusons ces élus d’inconséquence : alors que le réservoir de Lavalette peut garantir les besoins, ils refusent l’idée même de coopération avec l’agglomération stéphanoise pour mieux gérer la ressource, pour défendre ces très vieux prés carrés territoriaux et électoraux qui bloquent les solidarités.
Nous les accusons de « tromperie sur la marchandise » : en faisant croire localement que le barrage des Plats est l’unique solution à même de garantir l’approvisionnement en eau potable du secteur, ils manipulent la réalité, au détriment de leurs mandats.
Nous accusons pour finir les auteurs de ce gâchis d’immobilisme : nous avons besoin, pour adapter la société française à un monde qui change, d’acteurs qui s’efforcent d’intégrer ce que nous disent les scientifiques depuis 30 ans en matière de culture de l’eau, à savoir que nous devons changer de pratiques et non pas reproduire les recettes du «bon vieux temps».
Nous accusons naturellement et pour finir les zélateurs de cet ouvrage d’une méconnaissance si flagrante des questions écologiques qu’elle devient dangereuse : les milieux aquatiques ne vont pas bien, dans notre pays et en Europe. La Directive Cadre sur l’Eau nous impose de les restaurer, de les protéger.
Dégrader une « masse d’eau » en bon état écologique, une rivière vivante pour partie classée en réservoir biologique dans le SDAGE (Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion de l’Eau) Loire Bretagne révèle un mépris affiché à la Loi sur l’Eau et les Milieux Aquatiques de décembre 2006, affiche un dédain de l’Europe.
Nos accusations sont graves. Nous le savons. Mais, face à un tel déni de réalité, de prise en compte des savoirs contemporains, face à une telle panne de prospective et de démocratie, nous ne pouvons plus nous taire. Nous demandons, en cette période de changements majeurs, que l’Etat impose, c’est son rôle, un moratoire de 3 années sur ce projet dépassé et que les méthodes utilisées pour imposer un barrage aussi controversé n’aient enfin plus cours, ni dans ce département, ni ailleurs.
Ouvrons les fenêtres, les portes. Débattons. Echangeons. Sortons, comme le propose M. Tiberghien, conseiller d’Etat, auteur d’un rapport passionnant sur l’eau, de la « conflictualité qui entoure la gestion de cette ressource vitale » pour aller vers une approche apaisée, partagée, créatrice d’appropriation, d’entente. Il est nécessaire de changer de modèle.
Il est temps de s’adapter enfin à la nouvelle demande sociale, temps de rechercher les solutions innovantes, économes, écologiques.
En 2013, bétonner la Semène n’a aucun sens.

Avec le soutien de :

[one_fifth] Isabelle Autissier
Présidente WWF-France [/one_fifth] [one_fifth] Nicolas Hulot
Fondation pour la Nature et l’Homme[/one_fifth] [one_fifth] Yann Arthus-Bertrand
Fondation GoodPlanet [/one_fifth] [one_fifth]Roberto Epple
Président European Rivers Network – SOS Loire Vivante – Fonds pour la Conservation des Rivières Sauvages[/one_fifth] [one_fifth_last] Allain Bougrain Dubourg
Président LPO France [/one_fifth_last][divide style= »3″] [one_fifth] Arnaud Greth

Président Noë Conservation[/one_fifth] [one_fifth] Violette Dumont
Présidente Fonds Humus pour la Biodiversité [/one_fifth] [one_fifth] François Letourneux
Président d’honneur UICN France [/one_fifth] [one_fifth] Corinne Lepage
Présidente de CAP 21 [/one_fifth] [one_fifth_last] François Lemarchand
Fondateur et Président de Nature & Découvertes [/one_fifth_last][divide style= »3″] [one_fifth] Claude Roustan
Président de la Fédération Nationale de la Pêche en France [/one_fifth] [one_fifth] Jean-Claude Lefeuvre
Professeur émérite au Muséum National d’Histoire Naturelle, ancien président de l’Institut Français de la Biodiversité [/one_fifth] [one_fifth] Antoine Lardon
Président de la Fédération de Pêche de Haute-Loire [/one_fifth] [one_fifth] Jean-Jacques Orfeuvre
Président de REN 43 (Réseau Ecologie Nature Haute Loire) [/one_fifth] [one_fifth_last]Philippe Boisneau
pêcheur professionnel, président du Conapped [/one_fifth_last][divide style= »3″] [one_fifth] Christian Brodhag
Directeur de recherche Ecole des Mînes de Saint-Etienne [/one_fifth] [one_fifth] Serge Orru
Festival du Vent [/one_fifth] [one_fifth] Gilbert Cochet
Naturaliste et expert auprès du Conseil de l’Europe [/one_fifth] [one_fifth] Philippe Cochet
Président Nature Haute-Loire [/one_fifth] [one_fifth_last] Jean-Jacques Fresko
Rédacteur en chef du magazine Terre Sauvage [/one_fifth_last][divide style= »3″] [one_fifth] Jacques Blanquet
Réalisateur de documentaires sur l’eau et les rivières [/one_fifth] [one_fifth] Eric Feraille
Président Frapna Région [/one_fifth] [one_fifth] Michel Delmas
Membre du comité éditorial de Terre Sauvage [/one_fifth] [one_fifth] Raymond Faure
Président Frapna Loire [/one_fifth] [one_fifth_last] Jean Luc Cometti
Président Club de Pêche Sportive Forez-Velay [/one_fifth_last][divide style= »3″] [one_fifth] Jeanine Sarkissian
Présidente CDAFAL Loire [/one_fifth] [one_fifth] Denis Caudron
Coordinateur du Fonds pour la Conservation des Rivières Sauvages [/one_fifth] [one_fifth] Pierre Athanaze
Président de l’Association pour la Protection des Animaux Sauvages [/one_fifth] [one_fifth] Dominique Lang
Journaliste [/one_fifth] [one_fifth_last] [/one_fifth_last]

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